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La question des frontières africaines (1/2)

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Pour la plupart imposées au continent entre le XIXe et le XXe siècle, les frontières africaines ont très souvent été tracées avec aberration, forçant l’émergence tardive du concept d’Etat-nation. S’il est bien un continent où la réalité ethnique et sociologique a été bafouée par le traçage politique, c’est bien l’Afrique.

La géographie (ou plutôt géométrie) africaine il y a un siècle
La géographie (ou plutôt géométrie) africaine il y a un siècle

Il est de coutume de démontrer que la colonisation a plus marqué l’Afrique que n’importe quel autre continent. C’est évidemment vrai économiquement ou politiquement, mais l’héritage géographique est aussi prégnant. Ainsi, toutes les frontières actuelles en Afrique sub-saharienne ont été formées par les colons européens, la plupart au mépris total du tissu humain et culturel préexistant. Ceux-ci ont voulu matérialiser la frontière, si chère à l’identité européenne, leur domination sur le continent.

On date l’émergence du concept de frontière en Afrique à la conférence de Berlin en 1884-1885. Elle a permis, implicitement, aux colonisateurs de régler entre eux l’étendue de leur espace colonial, sans passer par d’éventuels accords avec les chefs locaux. La primauté de l’antériorité est fondamentale pour comprendre la vitesse avec laquelle les Européens se sont emparés de l’Afrique : Tout territoire nouvellement occupé par une puissance coloniale lui appartenait de fait, sans qu’une autre puissance coloniale ne puisse s’opposer. Cette ruée (ou « scramble ») a dicté cette logique colonialiste durant la toute fin du XIXe siècle et le début du siècle suivant. C’est ainsi que s’est déroulé la plupart des découpages de frontières dans l’Afrique « enclavée ». Concernant les pays possédant des littoraux, les Européens sont majoritairement partis des ports et comptoirs utilisés lors de la traite négrière pour constituer de nouveaux Etats. En résulte un enchevêtrement d’Etat francophones et anglophones tout autour du Golfe de Guinée notamment. Pourtant, malgré ce découpage décorrélé de l’histoire du continent, la toute jeune Organisation de l’Union Africaine plaida dès sa création dans les années 1960 pour une intangibilité des frontières, malgré les souhaits répétés d’un « Berlin II » des chantres du panafricanisme.

Il convient de ne pas généraliser ce constat. D’autres logiques décorrélées de la colonisation ont pu prévaloir ici et là. Ainsi en est-il du Congo Belge (la RDC actuelle), épousant les lignes du bassin du Congo, donnant là un statut particulier à un découpage hydrographique (tout comme le Niger, un peu plus au Nord). D’autres Etats son, eux, issus d’un héritage historique prégnant. L’exemple le plus parlant est celui du « pays des hommes intègres », le Burkina Faso, ex-Haute Volta, qui reprend trait pour trait l’influence séculaire de l’ethnie Mossi.

Même si elle a dû subir majoritairement un tracé décidé lors de la colonisation, l’Afrique moderne a su utiliser cet état de fait pour son propre intérêt. Les notions d’Etat et de nation commencent à poindre, et les frontières revêtent en Afrique le même rôle que partout : espace d’échanges, de migrations, mais aussi interfaces permettant toutes sortes d’activités informelles voire illégales. Nous verrons dans une seconde partie en quoi ces frontières peuvent désormais constituer une force pour le continent.

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